Ce court texte a été rédigé en anglais par le père Clarence d’Entremont et publiés dans le Yarmouth Vanguard le 6 mars 1990. Traduction de Michel Miousse
Le Yarmouth Herald, dans son édition du 28 septembre 1960, a publié une dépêche d’Ottawa sous le titre « Une Légende à l’Île du Prince Edouard – Des Cloches de Chapelle Enterrées Pendant Deux Siècles. »
Voici les trois premiers paragraphes de cet article : « Un ministre du cabinet fédéral est à la recherche des preuves d’une légende vieille de 200 ans sur l’enterrement de cloches de chapelle dans sa province natale, l’Île du Prince Edouard*. Il existe de bons fondements pour croire que cette histoire est exacte, mais aucune preuve réelle. C’est une histoire des guerres du 18ième siècle, des épreuves des pionniers et des vieilles récriminations raciales. Angus McLean, Ministre des Pêcheries, a dit lors d’une interview qu’il avait l’intention de suggérer un exercice Militaire pour découvrir les cloches perdues si les historiens peuvent affirmer avec certitude qu’elles ont existé, et nous indiquer l’endroit approximatif où elles devraient être découvertes. »
McLean à l’époque, était président de l’administration d’un groupe de ministres fédéraux et provinciaux qui travaillaient à l’élaboration du centenaire de la confédération en 1967.
L’article ajoute que « il est connu que les paroissiens de Malpeque ont enterré la cloche de leur chapelle afin d’éviter qu’elle tombe aux mains des Anglais. Cette cloche fut déterrée quelques années auparavant et est maintenant exposée à l’Église Unie* de Malpeque. Il est accepté que celles de Pointe Prim* et St-Pierre* furent aussi enterrées. Des histoires à cet effet nous sont parvenues depuis l’arrivée sur place des premiers colons Selkirk , en 1803. »
Il est établi que « les livres d’histoire sont silencieux sur ce qui est arrivé aux autres cloches des chapelles Catholiques Romaines. »
Le Ministre des Pêcheries de 1960, bien qu’on ait dit de lui qu’il était « un étudiant passionné de l’histoire de (son) île », n’avait sûrement pas lu tous les auteurs qui ont écrit à propos de cette île, ni vu les registres des églises de l’époque.
Les registres d’église de la paroisse St Jean l’Évangéliste* à Port Lajoie (Charlottetown) commencèrent en l’année 1720. En 1742, il y avait environ 800 personnes sur toute l’île. En 1750, ils atteignaient 2000. Vers 1753, il y avait 3000 habitants.
C’est durant cette année 1753, le 31 octobre que, M. Prévost, commissaire-ordinateur à Louisbourg, écrit au Ministre de France à propos de la population de l’île St-Jean, le nom donné alors à l’Île du Prince Edouard ;
« Tout le monde vint travailler à qui mieux-mieux pour construire la paroisse de Pointe Prime (St Paul, au sud de la Baie Hillsborough, dans le Comté de Queen), de la Rivière Nord Est* (St Louis, maintenant Scotchfort, Comté de Queen), de Malpec (la paroisse Sainte Famille, Comté de Queen) parce que la paroisse de St Pierre (à Havre Saint Pierre*, Comté de King) avait été construite avant la dernière guerre… Les paroisses qui sont pauvres, espèrent que vous ne leurs refuserez pas les QUATRE CLOCHES qu’ils vous ont demandé. »
Ces cloches durent arriver peu de temps après, quoique je n’ai pu trouver la date exacte de leur arrivée. Ainsi l’Acadie fut dotée de quatre nouvelles cloches, appelées la cloche de Pointe Prime, la Cloche de la Rivière Nord Est, la Cloche de Malpec et la Cloche de Saint Pierre.
En 1758, selon une tradition, lorsque les Acadiens de Saint-Pierre apprirent que les Troupes Anglaises étaient arrivées à Port Lajoie (Charlottetown), ils ont dépouillé l’église de tout ce qui pouvait être emporté, pour enterrer le tout, dans le sol. Le 9 août 1871, soit 113 ans plus tard, un monsieur Barry, qui habitait près du site de la vieille église de Saint-Pierre, au Havre Saint Pierre, alors qu’il labourait son champ, accrocha avec sa charrue, une grosse cloche, qui ne pouvait être autre que la Cloche de Saint Pierre. Elle fut donnée à la paroisse Catholique de Saint Alexis, à Baie Rollo*, à environ dix miles de Havre Saint Pierre. Elle y est toujours, quoiqu’elle ait subi quelques changements. En effet, lors de sa découverte elle était craquée, elle fut envoyée à la Meneeley Company of West Troy, pour être fondue à nouveau. Actuellement, elle porte l’inscription Française suivante : « Jésus – Marie – Joseph. P. Cosse m’a fait –Mechlin (en Belgique) 1871. Elle fut retirée des ruines d’une église d’un village à I.P.E. En 1882, les paroissiens de Baie Rollo m’ont fait fondre à nouveau par Meneeley et Co. De West Troy, N.Y. en souvenir de leurs ancêtres Acadiens. »
Des autres cloches de l’Île du Prince Edouard, nous connaissons le destin d’une seule, celle de Malpec, bien que nous ne sachions que très peu de choses des vicissitudes qu’elle a du endurer durant l’année qui suivit l’Expulsion. Elle est maintenant dans le clocher de l’Église Unie de Malpec. Sur celle-ci sont inscrits les mots Latins suivants, tirés de l’Évangile selon Saint-Mathieu, chap. 11, verset 11 : INTER NATOS MVLIERVM NON SVREXIT MAIOR JOANNES BAPTISTA, « Parmi ceux qui sont nés d’une femme, aucun n’est plus grand que Jean le Baptiste. »
Si les quatre paroisses qui étaient les filles de l’église mère de Port Lajoie, avaient leur cloche, nous pouvons être surs que la dite mère l’église avait aussi la sienne, bien que nous ne possédions aucun compte rendu à cet effet. La seule référence à une cloche en ces lieux, peut être trouvée dans le document de la chapelle et de la maison de Port Lajoie dans l’Ile St Jean « lequel document » fut esquissé en 1737 par le Père Caradet, un Père Récollet, qui avait été pasteur à Louisbourg, dans lequel est mentionnée une petite cloche qui était utilisée à l’église paroissiale.
Quoiqu’il en soit, il y a au moins deux cloches Acadiennes dans ce qui était l’Île St Jean qui sont encore en usage, une à Malpec, l’autre à Baie Rollo.
Il est vrai que cette dernière, la Cloche de Saint Pierre à la paroisse de St Alexis, n’est pas exactement la cloche originale ; elle est cependant du même métal, dans une nouvelle version, sous une autre forme.
De l’Île du Prince Edouard, nous nous déplacerons la semaine prochaine à la Rivière Saint-Jean au Nouveau Brunswick, où l’histoire de ses cloches est des plus intéressante.