Ce court texte a été rédigé en anglais par le père Clarence d’Entremont et publiés dans le Yarmouth Vanguard le 7 novembre 1989. Traduction de Michel Miousse
Il y a 300 ans de cela, en 1689, un 12 août, deux capitaines de Boston, Thomas Pound et Thomas Hawkins, ancrèrent leur ketch, le « Mary », à environ quatre miles sous Fort Royal, à Portland dans le Maine, lequel Fort était sous le commandement de Sylvanus Davis. Ils envoyèrent à terre John Darby pour quérir de l’eau, étant donné qu’il était connu du commandant Davis. Il dit au commandant que le ketch venait juste de passer Cap Sable lorsqu’il fut volé par un brigantin privé qui leur avait subtilisé un peu de plomb ainsi que presque toute leur eau et leur pain. Il demanda qu’un docteur soit envoyé à bord pour prendre soin de son maître qui s’était blessé à un pied. Mais quand Davis apprit qu’il y avait à bord un certain Capitaine Pound et un certain Capitaine Hawkins, il suspecta immédiatement qu’il avait affaire à des « gredins. » Entre temps, un certain nombre de soldats du Fort avaient planifié de s’évader et de rejoindre le ketch, emmenant avec eux des armes et des vêtements. Davis demanda que les soldats soient renvoyés au Fort avec le butin qu’ils avaient dérobé. Mais Pound se mit à rire de la requête et non seulement refusa de retourner quelque arme ou vêtement que ce soit ( lesquels avaient été volés à des soldats endormis) mais menaça d’aller directement au port et de foncer droit sur un sloop qui y était ancré.
Il n’y avait rien de vrai dans ce que Darby avait dit à Davis. La vérité est que Thomas Pound avait demandé à Thomas Hawkins de le prendre avec son bateau de pêche jusqu’à Nantasket, à environ 10 miles nautiques au sud-est de Boston. Ils venaient juste de quitter Boston lorsque Pound dit à Hawkins que son véritable but était de devenir pirate et lui demanda de se joindre à lui, ce qu’il fit. Pound allait prendre la charge des opérations. Ce fut ce même jour qu’ils s’emparèrent du ketch « Mary », laissant leur bateau de pêche au capitaine du ketch, Allen Chard. Deux jours plus tard, ils étaient dans la Baie de Casco*, lorsque John Darby mit pied à terre pour aller chercher de l’eau et raconter son histoire maison à Sylvanus Davis.
Après s’être rassasié d’un veau et de trois moutons qui broutaient sur une île, Pound se mit à naviguer vers Cape Cod, et tôt le matin du 16 il rencontra un sloop du nom de « Good Speed » appartenant à David Larkin. Comme ce vaisseau était plus grand que le « Mary », il fut pris d’assaut par les pirates, laissant le capitaine libre à bord du ketch. Pound lui dit d’avertir le Gouverneur de Boston que s’il entreprenait de venir les chercher, chacun de ses hommes allait être exécuté.
Pendant qu’il était à Cape Cod, il envoya quelques membres de l’équipage à terre où ils tuèrent quatre jeunes cochons. Peu de temps après, ils pillèrent un autre vaisseau de Newburyport, au nord de Boston (à la frontière du New Hampshire) avec ses 20 barils et demi de farine, de sucre, de rhum et de tabac.
Naviguant hors de Nantucket Sound, au sud de Cape Cod, le sloop rencontra un vent Nord-est et fut forcé de dévier jusqu’en Virginie. De là, Pound entreprit d’aller chercher quelque autre butin sous la forme d’une toile de navire, une pièce de vêtement de laine et un peu de teinture, avant de revenir vers le Massachusetts. En chemin, Hawkins s’aperçut qu’ils avaient été suivis ; mais ils échappèrent finalement à leurs poursuivants.
Peu de temps après avoir atteint Cap Cod, Thomas Hawkins, qui commençait à se fatiguer des manœuvres de Pound, réussit à s’évader. Il rencontra le Capitaine Jacobus Loper, un baleinier Portugais qui s’apprêtait à naviguer vers Boston. À ce moment là, Hawkins pensait qu’il serait en sécurité et pourrait échapper aux griffes de la loi. Mais Loper se dit qu’il ferait mieux de le remettre aux autorités de Boston et bientôt Hawkins fut encabané et logé en sécurité dans une prison.
Quelques jours plus tard, le ketch « Mary », que les pirates avaient volé à Chard et qu’ils avaient échangé par la suite pour le « Good Speed », était en chemin pour retrouver le « Good Speed », lequel était ancré dans une anse, au sud-est de Cape Cod, où Pound se préparait à naviguer vers Curacao, la colonie Hollandaise près de la côte Sud Américaine. Aussitôt que le « Mary » eut rejoint le « Good Speed. » Pound dans sa surprise, grimpa sur le pont avec son épée en main et cria : « Approchez pauvres entêtés et je vous assommerai sur-le-champ. » Lorsqu’on lui répondit que s’il abandonnait maintenant, ils lui feraient un bon quartier il répliqua : « Ah ! Oui, Chiens, je vais vous rendre quartier sur quartier. » Mais ce ne fut pas long avant que Pound se retrouve blessé par un projectile, alors que « plusieurs vies furent emportées. » Il y eut des pertes des deux côtés. Les pirates furent finalement capturés et emmenés à Boston, il en restait 14. Ceci se passait à peu près dans le même temps de l’année, exactement 300 ans auparavant. La plupart d’entre eux, incluant Pound et Hawkins, furent, déclarés coupables de félonie, de piraterie et de meurtre. Ils furent condamnés à « être pendu par le cou jusqu’à ce que mort s’en suive. »
Le 20 janvier (1690), le jour où la pendaison devait avoir lieu, Hawkins avait pratiquement la corde autour du cou, quand quelqu’un courut jusqu’au bourreau pour lui dire que le Gouverneur avait différé la pendaison. Il fut même entièrement pardonné, probablement à la requête de sa sœur, qui avait épousé un officier de haut rang de la colonie. Finalement, tous sauf un, reçurent leur pardon, incluant Pound. Pound et Hawkins furent par la suite placés à bord du « Rose » pour être envoyés en exil en Angleterre.
En atteignant le Cap Sable, le « Rose » fut intercepté par un bateau corsaire Français de trente canons et un combat vigoureux s’engagea. Le Capitaine du « Rose » fut massacré ainsi que plusieurs autres ; Hawkins décéda finalement de ses blessures. Quelque peu amoché, le « Mary » put quand même gagner l’Angleterre sans autres incidents.
Ici, Thomas Pound fut entièrement pardonné de tous les méfaits qu’il avait pu commettre sur les côtes de la colonie Américaine. Il écrit tout de suite au Gouverneur Andros du Massachusetts, qui se trouvait à London, pour lui donner les dernières nouvelles de Nouvelle Angleterre.
En 1691, il publie à London « Une Nouvelle Carte de la Nouvelle Angleterre », aujourd’hui très rare et de laquelle je suis le fier détenteur d’une copie ; elle a servi de modèle pour les autres cartes pendant près de 50 ans par la suite. Le 5 août 1690, juste quelques mois après son arrivée en Angleterre, il fut désigné Capitaine de la frégate « Sally Rose », de la Royal Navy. En 1697, son navire est stationné en Virginie, sous les ordres de son vieux patron le Gouverneur Andros. En 1699, il se retire et meurt en 1703, à Isleworth dans le Comté de Middlesex, « un gentleman respecté par ses amis et ses voisins. »